La Fabuleuse histoire de Nounou et Tamtam
Un conte de Patrick Motte
illustré par Serdu
Mécènes ou sponsors.
L’ouvrage que vous avez entre les mains a été imprimé grâce à l’aide généreuse de BELGACOM, des Maisons BOSSIER, de la Société CARBONE plus, de la boutique de tissus LA CHIFFONNIERE, du Garage CHOQUET-JANSSENS, de l’association de commerçants COMMERCENTRE, des Cafés-Torréfaction FRETIN, des OLYMPIADES D’ORTHOGRAPHE de la Ville de TOURNAI, de l’hebdomadaire toutes boîtes passe-partout, du Laboratoire PHARMADEAL, des Jardineries SUPER-JARDIN, de la société de travail intérimaire Trace ! du C.F.R.P., de l’ASBL BIPLAN.
 
Lors de la dernière opération TELEVIE 2003, un nouveau chèque de 24790 € a été remis au profit du Fonds National de la Recherche Scientifique : en fin de compte, sur trois ans de présence, l’asbl Biplan a pu remettre une coquette somme de 61.975 € soit l’équivalent de 2.500.000 FB.
 
L’année prochaine, lors de l’opération TELEVIE 2004 un autre chèque suivra qui sera, nous l’espérons, encore important.
 
D’autres mécènes se manifesteront peut-être et la vie pourrait consentir à Patrick Motte un sursis plus long : dans ce cas, vous pourriez trouver prochainement :    
Le jour où…
La carrière du huitième jour.
Sans doute la nuit qui s’annonce…       
Du stéthoscope au gri-gri.

 

Chapitre 1

BONJOUR, ON M’APPELLE NOUNOU !

   

- Bonjour, on m’appelle NOUNOU ! C’est Céline, ma petite Maman adoptive, qui m’a appelée ainsi. Je suis une jolie - c’est mon avis, cela n’engage que moi - poupée noire, mes cheveux noirs comme de l’ébène sont courts et crépus. Mes yeux marrons sont très sombres mais sourient à la vie ; je les ferme quand on me couche. Ma bouche pulpeuse est constamment entrouverte dans un sourire espiègle. 
La jolie poupée noire amorce un petit mouvement de ses paupières aux cils immenses, elle continue son monologue :
- Céline est très gentille avec moi, elle se charge de ma toilette. Le matin, elle m’enlève, avec beaucoup de douceur, les nœuds qui se sont formés dans ma chevelure pendant la nuit ; chaque jour, elle choisit mes vêtements. J’ai la chance d’avoir une jolie garde-robe que m’a faite, avec amour, Mémé Adrienne. Mémé c’est la Maman de Marie et Marie est la Maman de Céline : Vous me suivez ?
NOUNOU est sceptique ; d’ordinaire, avec Céline, elle est assaillie par une multitude de pourquoi ceci, pourquoi cela ! Pour une fois, il semble qu’elle a été d’une clarté lumineuse ! Alors elle continue : 
- Mémé est à la retraite depuis l’année dernière. Depuis qu’elle ne travaille plus à l’usine de pièces d’autos, elle vient plus souvent à la maison pour garder Céline et Nicolas quand Marie et Pierre vont dans un bon restaurant, vont au spectacle ou à une soirée. J’espère qu’ils n’en profitent pas pour forniquer*… mais si cela arrive ! 
La jolie poupée laisse passer, dans son regard, un éclair malicieux avant de poursuivre : 
- Mais passons, je reviens à ma collection de vêtements : il y en a de toutes les couleurs. Ma petite Céline peut farfouiller dans la manne en osier, elle sait que Marie va remettre de l’ordre dans son fourbi ! 
NOUNOU est assez fière de nature, elle est aussi très coquette :
- Ma robe préférée est la toilette traditionnelle des Antilles en madras* avec son foulard du même tissu noué dans mes cheveux ! 
La poupée amorce une moue de ses lèvres vermeilles :
- Ma petite Maman adoptive me parle beaucoup, elle me raconte sa vie au jour le jour et moi je l’écoute ! Quand je lui réponds, souvent elle me comprend !
NOUNOU garde une inquiétude séculaire :
- Au début, j’ai cru que ma noirceur serait un obstacle dans notre relation ! Ce ne fut pas le cas : notre différence de couleur de peau n’a jamais été un problème pour ma petite Maman. Au contraire, très fière de moi, Céline a voulu, malgré ma grande taille, m’emmener à l’école. Elle m’avait placée dans un sac de plastique, pour me protéger sur la route et c’est Nicolas qui m’avait porté jusqu’à l’école.
La jolie poupée se souvient de l’épreuve comme si c’était hier : 
- Bout’chou - c’est ainsi que la surnomme son grand frère – voulait me présenter à ses copines de classe ! Hélas, certaines de ses camarades de classe, pour se rendre plus intéressantes, se sont moquées de mon teint chocolat !
Dans les yeux sombres de NOUNOU passe un éclair de dépit :
- Madame Sophie avait le coup de foudre pour moi, c’était évident. Elle a été choquée et triste de l’attitude des filles. Du coup, elle a demandé, à ma petite Maman d’adoption, de me cacher. 
NOUNOU se croyait revenue cent ans en arrière, du temps de l’esclavage :
- Déçue, Céline m’a remise dans mon grand sac qu’elle a déposé à côté de son petit cartable jaune et elle a boudé le reste de la journée ; jusqu’au départ de l’école en fin d’après-midi. 
La jolie poupée noire n’a pas oublié :
- Moi, j’ai paniqué car j’étais dans le noir, cela a beau être ma couleur de peau, noire dans le noir, ce n’était pas très gai… J’ai pleuré tout au fond de moi et j’ai soupiré à fendre l’âme… Heureusement, à part Céline, personne ne m’a entendue !
La déception de la poupée a été de courte durée. Elle le raconte :
- Lors du retour à la maison après les classes, Nicolas a consolé sa petite sœur et lui a promis de lui raconter, le soir même, deux histoires au lieu d’une.
- Bonjour, je m’appelle Céline. Je viens d’avoir cinq ans, je suis en dernière année de classe gardienne, je sais déjà compter jusqu’à dix… non vingt ! 
NOUNOU intervient :
- Ma petite Maman d’adoption est blonde comme l’est sa Maman, heureusement qu’elle n’a pas hérité de son Papa. Elle a les yeux bleus ; à sa dernière visite médicale, elle mesurait 110 cm pour 15 kilos, le médecin a écrit sur son rapport qu’elle était grande et mince pour son âge.
- Je sais aussi écrire mon nom et mon prénom : Desbois et Céline ! Je sais faire plein de choses et, parfois, Maman me laisse l’aider à la cuisine.  
- Hi, hi, je me souviens quand tu as voulu l’aider à faire les crêpes ! C’était d’un drôle : il y avait plus de pâte sur tes vêtements et dans ma chevelure que dans la poêle ! ironise NOUNOU. 
Entendant la remarque de son Doudou, la fillette, pourtant très fière d’elle-même, n’insiste pas. Elle préfère changer de registre et elle poursuit :
- Pour la dernière fête des mamans, j’ai fait - de mes petites mains à moi - un joli cadre en carton que j’avais entouré de raphia avant d’y mettre la photo de ma classe. 
- Je m’en souviens, déclare NOUNOU, tu dépassais la langue et son petit bout m’apparaissait tel une fraise ! C’était drôle et appétissant !
La fillette décide de ne pas répondre à sa jolie poupée noire, elle continue sur sa lancée :
- Maman était super contente, elle a trouvé que j’étais la plus jolie parmi toutes les filles : c’était chouette ! 
NOUNOU proteste :
- Petite Maman je ne vois plus rien ! 
En racontant la fin de son anecdote, la petite Céline est excitée, elle a accroché le madras qui entoure les cheveux de NOUNOU
Quand la poupée noire proteste, la fillette - elle a l’habitude de cet incident - replace sur ses cheveux le foulard qui a glissé devant ses yeux tout en continuant à parler :
- Pour la fête des Papas, Madame Sophie avait demandé que tous les enfants de la classe ramènent à l’école un rouleau de carton qui se trouve au milieu du papier toilettes. 
NOUNOU s’esclaffe : 
- Quelle drôle d’idée, du papier cul, on aura tout vu !
- NOUNOU, arrête, laisse-moi parler ! 
La petite Céline n’est pas patiente ; elle s’empresse de continuer :
- Je n’ai pas trouvé à la maison de rouleau de carton ! 
- Forcément, Marie est une maniaque de l’ordre, elle ne peut rien voir traîner, alors, elle jette tout au fur et à mesure ! 
La petite poupée noire a déjà bien vécu, elle parle en connaissance de cause : d’ailleurs, cette fois, Céline acquiesce sans lui intimer l’ordre de se taire. Elle reprend ses explications là où elle en était restée :
- Alors j’en ai déroulé un nouveau jusqu’au bout. J’ai eu bien du mal à cacher les feuilles qui entouraient le tube de carton ; je les ai mises dans un sac pour les poubelles. Pas de chance, Maman les a trouvées ! 
- C’était couru d’avance, ce n’était pas très malin de ta part ! Je ne me souviens pas de la réaction de ta Maman mais je peux l’imaginer !
- Elle a rouspété ; elle a dit que ce n’était pas bien, que c’était du gaspillage ! 
- Je suis de son avis ! 
La fillette prend un air contrit et serre plus fort son Doudou contre son cœur.
- Petite Maman, tu m’étouffes !
La jolie poupée dont la peau prend, sous les rayons du soleil, les couleurs du chocolat, se plaint. 
Céline desserre l’étau charmant avant d’ajouter : 
- Nicolas, mon grand frère a rigolé de moi ! Enfin, moi j’avais mon rouleau de carton, c’était le principal ! 
- Tu aurais pourtant pu t’éviter une engueulade !
- Oui, tu as raison, Madame Sophie est venue en classe avec un sac rempli de rouleaux de carton !
- Elle avait prévu son coup depuis longtemps. C’est certain !
- Ne fais pas ta maligne, NOUNOU ! 
Céline reconnaît qu’elle a été naïve, elle a un sourire malicieux :
- L’institutrice nous a fait coller un côté du rouleau sur un sous-bock* puis elle nous a demandé de peindre le tout en vert pomme avant de nous faire coller des petits anges découpés dans du papier rouge : beurk, ce n’était pas joli, joli ! 
NOUNOU approuve :
- C’est vrai que ce n’était pas super !
De nouveau la fillette réagit à la remarque de la jolie poupée - il faut dire qu’elle-même est encore déçue du résultat - elle balance, à bout de bras, son Doudou…
- Arrête, s’il te plaît ! Si tu continues, tu vas encore me déboîter l’épaule comme la dernière fois… 
La jolie NOUNOU essaie d’hausser le ton de sa voix aux fins d’attirer l’attention de Céline et ça marche ! 
La petite fille la reprend contre elle et la cajole, elle n’a pas voulu lui faire du mal. 
Quand son Doudou se calme, Céline reprend sa conversation :
- Heureusement, le jour de la fête des Papas, j’avais d’abord récité le compliment que j’avais appris de…
- Par cœur ! 
- Quoi ?
- On dit : appris par cœur ! 
- Je ne savais pas !
- Quand tu ne m’auras plus, que feras-tu ?
Céline se contente de serrer plus fort NOUNOU contre son cœur.
- Oups ! 
La poupée réagit immédiatement, elle se décide à laisser sa petite Maman d’adoption terminer sa présentation :
- Mais j’ai bien vu dans ses yeux que Papa était déçu. Je me suis promise de faire beaucoup mieux l’année prochaine. 
La petite poupée noire hoche la tête avec conviction puis veut bousculer le programme de Céline :
- Je te fais confiance, tu es capable d’autre chose… 
Céline se redresse et change de sujet, elle déclare :
- Je vais vous présenter quelqu’un que j’aime très fort, vous la connaissez déjà car je la serre dans mes bras et si vous êtes enfant, vous l’avez déjà entendue car c’est une grande bavarde !
NOUNOU soupire : 
- Ce n’est pas gentil ! Enfin, l’essentiel c’est que ma petite Maman d’adoption va me présenter ! Enfin… Ce n’est pas dommage :
- Si tu ne te tais pas, je ne raconte pas notre histoire…
- Soit, je ferme ma petite bouche !
- Quand même… Bon, je reprends : pour mon avant-dernier anniversaire, Maman - elle c’est Marie - m’a offert ma NOUNOU ! 
NOUNOU fait la fière !
- C’était la poupée de ma Mémé ! C’est ma nouvelle poupée à moi et je l’aime ! Je la bichonne ! Chaque matin, je prends soin d’elle… 
- Pour ça, c’est bien vrai ! admet la poupée
- J’ai hésité longtemps avant de l’amener à l’école, poursuit Céline, si j’avais su, je ne l’aurais pas fait car, depuis que j’ai présenté ma NOUNOU à l’école, j’ai l’impression que Madame Sophie m’aime moins : je m’en fiche, depuis, moi je la boude ! 
- Moi, j’ai vu que Sophie m’a aimée tout de suite. Je sais que, pendant toute son enfance, elle a rêvé d’avoir une poupée comme moi. Hélas, sa Maman n’a jamais eu les moyens de lui offrir un tel cadeau ! 
- Bonjour, je m’appelle Marie Desbois-Gonthin, je viens d’avoir trente cinq ans. Comme je suis plutôt jolie, avenante et blonde de surcroît, j’ai trouvé une place de vendeuse à mi-temps dans une boutique de produits de beauté et de parfums au centre de Tournai.
- C’est vrai, Marie est blonde comme un Petit Beurre, elle a des yeux couleur de ciel, elle est superbe ! 
NOUNOU la bavarde apporte son commentaire ; c’est plus fort qu’elle.
Marie évidemment n’a rien entendu, elle fait partie du monde des grandes personnes, celles qui sont privées de l’accès au monde fabuleux des Doudous ; elle continue sa présentation :
- Je suis la maman de Nicolas qui a un peu plus de onze ans. Mon fils je l’ai eu avec un ami que j’aimais très fort mais qui m’a reniée. Ainsi abandonnée, j’ai eu bien du mal à assumer mon état de Maman célibataire ; j’en ai fait une dépression. 
- Chez nous, dans les Antilles, on dit toujours : flirter OK mais pas forniquer avant le mariage ! J’ai mis du temps avant de comprendre le sens de ce mot : depuis, il reste sur ma langue ! 
Décidément la poupée noire n’en loupe pas une. 
- Plus tard, poursuit Marie, c’était il y a plus de sept ans, j’ai rencontré Pierre qui était client à la boutique dans laquelle je travaillais et où je travaille toujours aujourd’hui. 
Le docteur Pierre Desbois est un ami de longue date de Valérie Couvreur*. Valérie, c’est la responsable d’une parfumerie située au centre de Tournai. 
- Moi, je connais bien son surnom ! 
NOUNOU veut, comme souvent, se rendre intéressante mais comme ce texte est un encart, seuls les lecteurs peuvent profiter de ses remarques.
Avant même l’engagement de la jolie Marie, les jeunes vendeuses de la parfumerie, s’amusaient entre elles du look du médecin. Les filles surnommaient Pierre : Goupil*, à cause de ses cheveux, de sa barbe et de ses poils roux. 
- Moi, j’aime les gens comme Pierre, ils font partie de cette nouvelle génération d’hommes soucieux de la qualité de leur peau ; ils en prennent soin tout autant que de leurs dents et de leurs vêtements !
On ne lui demande pas son avis, NOUNOU le donne quand même.
Le médecin poussait régulièrement la porte de la parfumerie - et ce depuis longtemps - pour prendre les conseils judicieux de son amie Valérie. 
- Même s’il n’y a rien entre eux, Pierre et Valérie sont de très grands amis : ils se sentent bien ensemble. Et moi, j’aime l’amitié assortie de tendresse !
Il faudra que le lecteur s’y fasse, la jolie poupée noire a l’art de ne pas se laisser oublier : c’est le moins que l’on puisse dire ! 
Dès que Marie fut engagée, Pierre vint encore plus souvent et petit à petit, ses anciennes habitudes changèrent. Avant l’arrivée de cette dernière, le médecin ne se pointait jamais à la boutique le mercredi car c’était le jour du congé hebdomadaire de Valérie. 
- Moi, je ne veux pas médire, mais avouez que c’est troublant !
 NOUNOU devient insupportable et l’auteur est sur le point de se fâcher : dernier avertissement !
Bientôt, peu de temps après l’engagement de Marie, Pierre vint aussi à la parfumerie les mercredis. Il s’arrangeait alors pour être servi par la nouvelle venue : il cherchait ses conseils !
Ce changement dans le rythme des visites de mon Pierre suscita bientôt des questions du genre :
- Pourquoi vient-il nous voir plus souvent ?
- Comme c’est étrange, comme c’est bizarre ! constate NOUNOU que personne n’entend.
- Il vient pour Valérie, ils sont amis ! répondaient mes collègues de travail.
- Tu le crois ? lança Dorothée d’un air coquin.
Un jour, Valérie jeta un pavé dans la mare. La gérante avait, elle aussi, remarqué que Pierre trouvait les prétextes les plus anodins pour multiplier ses visites :
- Il y a anguille sous roche ! a-t-elle dit.
- Valérie, tu n’as pas encore remarqué, enchaîna Anouck, Goupil ne vient jamais quand Marie n’est pas là ; par contre, il vient aussi le mercredi alors que tu es en congé ! 
- C’est vrai ? demanda Valérie.
- Eh oui ! approuva Sophie. 
- C’est évident, désormais Goupil ne vient plus seulement pour te voir ! ajouta Dorothée, il vient parce qu’il a flashé sur Marie ! 
Marie ne participait pas à la conversation de ses collègues mais elle entendait tout ; elle rougit jusqu’aux oreilles. Elle crut tout d’abord que ses collègues bluffaient mais elle dut se déciller : Goupil venait bien pour ses beaux yeux ! 
Marie est émue, elle poursuit sa présentation :
- J’ai dû me rendre à l’évidence : Pierre, que mes collègues de travail surnommaient Goupil, cherchait ma compagnie !
- Ca se voyait comme le nez au milieu du visage ! se gausse la petite poupée noire qui n’était pas présente à la parfumerie mais qui préfère mettre son grain de sel.
Comme si elle pouvait entendre NOUNOU, Marie s’arrête et sourit :
- Valérie et les autres vendeuses de la parfumerie n’ont pas été obligées de faire longtemps le siège devant ma naïveté. 
- Naïve, c’est le terme que je cherchais ; je l’avais sur le bout de la langue !
La langue de NOUNOU, il serait parfois utile d’en couper le bout !
- J’ai ôté bien vite mon accoutrement d’oie blanche ! poursuit la jolie blonde. Dès lors, je me suis intéressée au rouquin. 
Pierre n’attendait que cela. 
Marie poursuit :
- Il m’a invité à prendre un verre au café situé à proximité. Mon heure de table était proche et j’ai accepté. Nous avons beaucoup parlé et j’ai appris qu’il s’appelait Pierre, qu’il approchait de la quarantaine et qu’il était médecin : je n’ai retenu que cela ! 
La jolie blonde inspire profondément.
- Assis en face de moi, il ne m’apparaissait pas si mal !
- Tu parles, tu te liquéfiais…
Marie qui n’entend pas la poupée noire, fait la moue :
- Pierre et moi nous nous sommes plu tout de suite ! Deux jours plus tard - j’avais réussi à caser mon fils chez une amie - nous sommes sortis ensemble. 
En évoquant ce souvenir, Marie rougit, elle est fort émotive. 
- Pourtant, elle avait déjà été prise à ce petit jeu ! J’imagine qu’elle n’a pas attendu le mariage avant de forniquer !
NOUNOU continue à se mêler de choses qui ne la regardent pas : c’est plus fort qu’elle !
- Nous nous sommes tout de suite bien entendus, poursuit Marie, et nous avons fini par approfondir nos relations !
- Je le disais : la première leçon ne lui avait pas suffi ! Elle a copulé avant de passer devant le maire et le curé !
NOUNOU hausse ses longs sourcils d’un air peiné et Marie reprend son souffle avant d’ajouter :
- Mais j’avais été échaudée par ma première expérience, depuis je prenais la pilule. De plus, j’avais toujours des préservatifs dans mon sac car j’ai une peur panique des hépatites et du SIDA !
- Ouf ! Marie sortait couverte ! 
La poupée noire donne vraiment l’impression de savoir ce dont elle parle !
- Bientôt je me suis lancée à l’eau, ajoute la jolie blonde, je lui ai présenté Nicolas : mon garçon. 
- Je vous rassure, Marie nage comme un gardon…
- Entre Pierre et Nicolas ce fut le coup de foudre ! continue Marie imperturbable et pour cause : elle n’entend pas NOUNOU. Après quelques mois, je me suis mariée avec Goupil, j’avais banni les préservatifs et j’ai arrêté la pilule ; je voulais avoir un enfant. 
NOUNOU se croit obligée de mettre son grain de sel :
- Goupil est doux comme un agneau : bizarre pour un renard ! Vous ne trouvez pas ?
Marie n’a toujours rien entendu, elle achève :
- J’aime mon Pierre, il est le père de ma petite fille Céline qui vient d’avoir cinq ans. 
- Céline c’est ma petite Maman d’adoption ! Enfin, vous savez déjà tout cela !  
- Bonjour, je m’appelle Pierre Desbois, je suis médecin de famille, je vais sur mes quarante cinq ans, je suis marié avec Marie Gonthin depuis sept ans. 
- Dis donc, comme le temps passe, je suis surprise !
NOUNOU n’est dans la famille de Pierre que depuis trop peu de temps, elle en apprend encore tous les jours.
- Le petit Nicolas, continue Pierre, je l’ai trouvé tout fait dans la corbeille de mariage.
- C’était un beau cadeau ? 
NOUNOU est assez facétieuse. 
- C’était un plus ! ajoute Pierre comme s’il avait pu entendre la poupée noire. Avant de rencontrer Marie - par l’intermédiaire de mon amie Valérie Couvreur - j’avais déjà été marié pendant huit ans mais, malheureusement, je n’avais pas eu d’enfant : ce fut peut-être la cause de notre séparation puis de notre divorce. 
- Je connais bien les hommes et je pense que celui-ci est toujours nostalgique ! 
C’est l’interprétation de la petite poupée à la peau noire. 
Pierre se passe la main en râteau dans ses cheveux roux ; c’est un signe chez lui : signe de malaise ou de désarroi. Il reprend le cours de sa présentation :
- Je fais un complexe de mes cheveux roux : j’ai un jour décidé de les raser mais cela me faisait la tête comme un œuf de Coucou de Malines, alors j’ai laissé repousser ma crinière de lion. J’ai appris récemment que Marie et ses collègues de la parfumerie me surnommaient Goupil…
Le médecin hausse les épaules et change de sujet :
- Nicolas, le fils de Marie, fut pour moi comme un cadeau. Aujourd’hui, je le considère comme mon fils et j’en suis fier, c’est un beau gamin. Il est fort intelligent. Il est en tête de sa classe. En juin prochain, il terminera ses primaires. Je pense qu’il fera de longues études, c’est mon souhait : je sais qu’il en est capable. 
- C’est vrai que Goupil considère Nicolas comme son fils. Depuis que je suis là, j’ai souvent eu l’occasion de le voir. Quand Nicolas approche, Pierre est comme fou ; pour peu, il ferait sa chattemite… 
En lançant cette affirmation, NOUNOU est attendrie.
Le médecin toussote avant de continuer :
- Céline est ma fillette, c’est la prunelle de mes yeux, la lumière de ma vie ; je l’adore. 
- Moi je vous dis qu’il va finir par pleurer, qui prend le pari ?
La poupée noire est non seulement bavarde, elle est aussi joueuse !
Pierre ne l’entend pas, il se reprend et continue :
- Il faut dire qu’elle est douce et gentille, câline comme pas deux. Quand elle vient se blottir dans mes bras pour que je lui raconte une histoire, j’aime sentir ses cheveux blonds, j’ai l’impression qu’ils sentent le miel : en tout cas, ils en ont la couleur. En plus de la couleur de ses cheveux Céline a les yeux de sa maman, ils sont bleus comme un ciel d’été. 
- Toi aussi tu as les yeux bleus, ils sont très beaux ! Ce que les hommes sont poètes quand ils aiment !
La jolie poupée noire fait sa énième intervention. 
Pierre qui n’a pas entendu le compliment de NOUNOU sourit de sa métaphore, il poursuit :
- Quand je vais trop vite pour raconter mon histoire, ma fille se retourne et de sa petite main, elle me ferme la bouche. Je sais alors que je dois répéter la dernière phrase. 
- J’adore quand ma petite Maman d’adoption me fait ces gestes tendres ! 
NOUNOU a le tempérament des Antilles : de l’exubérance mélangée à du romantisme : c’est touchant ! 
La voix du médecin change quand il ajoute :
- Marie et moi, nous essayons de profiter au maximum de sa tendresse car l’année prochaine elle entrera en classe primaire et ce ne sera plus la même chose !  
- Bonjour, je m’appelle Nicolas Gonthin, j’ai les yeux marron et les cheveux noirs, j’aurai bientôt douze ans, je suis grand pour mon âge et Maman dit que je dois manger beaucoup pour grossir.
- C’est vrai que ce grand bêta frôle le mètre et demi et ne pèse que trente kilos ; il passerait entre une affiche et le mur sur lequel elle est collée. 
NOUNOU y va fort. Nicolas l’entend et lui fait un pied de nez, il est habitué aux remarques du Doudou de sa petite sœur. Il continue : 
- Je suis déjà un grand garçon et Maman m’appelle son petit homme ! 
- Petit homme, c’est toi qui le dis, pour moi tu es encore un grand bébé un peu fada ! proteste NOUNOU.
- Ne l’écoutez pas, NOUNOU est folle ! propose Nicolas qui s’irrite de l’intervention du Doudou de Céline : le garçonnet ignore que seuls les enfants peuvent entendre les remarques des Doudous. 
Nicolas continue derechef sa présentation : 
- J’ai une petite sœur, je l’appelle Bout’chou, mais ce n’est pas son vrai prénom : en fait, elle s’appelle Céline. Depuis deux ans, j’ai la charge d’aller la rechercher en classe. Nous faisons la route ensemble ; je lui tiens la main et je marche à côté de mon vélo. Parfois, je lui permets de s’asseoir sur la selle de ma bicyclette ;  alors je suis très, très prudent. Bout’chou me raconte des choses de sa vie !
- C’est vrai, Nicolas est comme une mère pour ma petite Maman d’adoption !
NOUNOU est contente du comportement du petit garçon, elle le dit.
- Je ne suis pas comme une Mère, je suis son chevalier : comme le Capitaine Flam.
Nicolas qui a entendu le commentaire du Doudou de sa petite sœur s’est empressé de mettre les choses au point !
- Tu ne dois pas te comparer à un héros de dessin animé, c’est inutile.
- Pourquoi pas ? Ah oui, évidemment, toi en tant que fille tu préfèrerais que je prenne comme modèle le petit ami de Barbie
 - Ce n’est pas ce que je voulais dire, moi je t’admire parce que tu es Nicolas et que tu protèges ta petite sœur ; tu es patient avec elle, tu l’écoutes, tu lui fais aussi la lecture de ses livres préférés !
- Elle en est encore aux livres avec beaucoup d’images et un petit texte ; en plus, elle tourne les pages avant que j’aie fini de lire les textes !
- Tu ne faisais pas la même chose à son âge ?
- Non, moi, quand j’avais son âge, je regardais seulement la télé !
- Ce n’est pas mieux !
-Arrête ! Tu commences à m’énerver, laisse-moi terminer ma présentation !
- Vas-y, j’entends que Céline se réveille, je vais m’occuper d’elle.
Le petit incident est clos, Nicolas parle sur un autre ton, il devient plus sérieux :
- Pierre est très fier de moi ; je sais bien qu’il n’est pas mon vrai Papa mais c’est tout comme ! 
Il prend un air désabusé et poursuit :
- Mon vrai Papa je ne le vois que de temps en temps : quand il y pense ! me dit Maman. 
- Mm, ouais, il n’y pense pas souvent ! 
NOUNOU exprime le fond de sa pensée : c’est inutile mais ça soulage…
Le petit Nicolas a décidé de ne plus relever. Il est triste quand il fait le commentaire suivant :
- C’est bien vrai que Roger - c’est le prénom de mon vrai Papa - n’y pense pas souvent, il n’a même pas voulu me donner son nom !
Le garçon plisse les yeux pour refouler ses larmes :
- Si tu étais vraiment un homme, maintenant tu pourrais pleurer sans honte ! Pleurer n’est pas toujours une preuve de faiblesse ; quoi qu’on en dise ! Cacher son émotion à tout prix : quelle fadaise ! commente NOUNOU.
Nicolas est surpris par la déclaration de NOUNOU, il n’a pas tout compris mais il sait qu’il ne doit plus retenir ses larmes :
- Mon vrai Papa m’a fait beaucoup de chagrin ! Mais, maintenant, j’essaie de ne plus y penser. Pierre, lui, fait beaucoup de projets pour moi. Il voudrait me donner son nom : je trouve que m’appeler Nicolas Desbois ça serait très bien ! 
- Là, j’aime assez ! soliloque NOUNOU.
Nicolas ajoute :
- Maman et Pierre sont allés voir un avocat ; quand ils sont rentrés, j’ai vu qu’ils avaient pleuré. 
- Les garçons de cet âge ne comprennent rien à rien !  Pour un peu, moi aussi j’en pleurerais ! 
C’est le constat que fait la jolie poupée noire. 
Quoi qu’il dise, Nicolas n’est encore qu’un enfant, c’est à ce titre qu’il lui arrive de comprendre partiellement les phrases que lâche la jolie bavarde ; il hausse les épaules et achève :
- Mon deuxième Papa me voit déjà Docteur, comme lui. Moi je préfèrerais être ingénieur pour construire des autos de course Ferrari ou alors des avions Alpha-Jet* qui font de la fumée bleu, blanc, rouge, comme ceux de la Patrouille de France ! Maman me dit que je dois d’abord bien travailler à l’école, mais quoi, c’est pas beau de rêver ? 
- Oh si, c’est beau ! Ainsi moi je rêve que je suis la princesse de toutes les poupées noires et qu’elles s’occupent de moi quand ma petite Maman d’adoption est à l’école et qu’elle doit me laisser seule sur son lit ! 
- Toi, tu fais des rêves impossibles, intervient Nicolas, l’esclavage est interdit, tu sais pas ?   
- Ce ne serait pas de l’esclavage ! A quoi bon, tu ne comprends rien à rien ! 
La petite poupée noire ferme à moitié les yeux.
- Cause toujours ! Ou plutôt non : tais-toi un peu, bavarde, maintenant, tu me fatigues…Occupe-toi de tes robes et de tes foulards !

 

Chapitre 4

CE NE SONT PAS DES FAÇONS !

Cinq heures du matin, le jeudi 22 novembre 2001, Damien Rocher couché sur un brancard, entre dans le sas des Urgences de la clinique du Val du cerf, en compagnie de Camille et d’un pompier : la Maman du petit garçon est montée dans l’ambulance à côté de son fils. 
Le garçonnet tient fermement son Doudou par une oreille. 
- Aïe, tu me fais mal, tu sais que mes oreilles sont fragiles ! 
Le petit lapin bleu et blanc commence à avoir l’habitude de ces voies de fait : il se plaint.
Le petit garçon ne réagit pas, il ne l’entend pas, il est dans le vague, il geint ! Son lapin constate :  
- Mon petit Papa d’adoption, tu ne m’apparais pas très présent…  
Pierre,  le Papa de Céline, est venu examiner Damien chez lui : il est le médecin de la famille Rocher depuis les premiers mois de son installation.  
En arrivant chez ses patients, le docteur Desbois a, tout d’abord, salué Jean et Camille puis, sans perdre de temps en vains préambules, il est monté voir le petit malade.
Au premier abord, en entrant dans la chambre de Damien, Pierre s’étonne de constater la pénombre qui règne dans la pièce.  
- Pourrais-je avoir plus de lumière ?  
- Bien sûr, répond Camille, j’avais supprimé la lumière à la demande de mon fils !  
- Merci Docteur, je vais enfin pouvoir regarder mon petit Papa d’adoption de plus près !  
Avec le nouvel éclairage, TAMTAM n’est pas plus rassuré par la mine de son petit Damien : l’enfant est gris !  
D’emblée, quand la lumière vive illumine la chambre, le petit garçon laisse entendre un gémissement et crispe les yeux ; instinctivement, avec beaucoup de maladresse, il cherche à les couvrir de la main.
Pierre Desbois est assez effrayé par l’état stuporeux* de l’enfant, il s’approche et pose le dos de sa main droite sur le front du petit garçon :  
- Il est plein de fièvre ! dit-il après quelques instants.  
- Je le savais bien, il me donne si chaud depuis des heures…    
Le petit lapin bleu et blanc soupire, sa remarque tombe à plat car personne ne l’entend : mis à part Damien qui est dans le gaz, il n’y a que des adultes dans la pièce. 
- Vous n’avez pas de thermomètre dans la maison ? demande le médecin.  
- Si, répond Camille, j’ai d’ailleurs pris la température de mon petit avant que vous n’arriviez !  
- Et quel est le résultat ?  
- Il a plus de quarante, à l’anus !  
Camille énonce ce nombre dans un souffle. Pierre hoche la tête, il passe la main dans sa chevelure rousse qu’il n’a pas pris le temps de discipliner et commence son examen.  
En plus de la température élevée et de la photophobie, le médecin constate que le petit garçon se place, spontanément, dans une attitude en chien de fusil*. Il éprouve des difficultés à l’examiner et doit demander de l’aide à Camille pour réussir à lui faire ouvrir la bouche. Il lui trouve alors un pharynx très rouge avec des amygdales pultacées*. 
- Damien, tu veux t’allonger sur le dos ? demande le médecin à l’enfant.  
- Ca va lui être très difficile dans l’état où il se trouve !  
TAMTAM en a pitié.  
Effectivement, le garçonnet éprouve de réelles difficultés à comprendre et ensuite à effectuer ce que son Docteur lui demande. Quand il réussit enfin à prendre la position indiquée, le praticien essaie de lui fléchir la nuque : 
- Sa nuque est raide ! constate-t-il.  
Depuis le début de son examen, Pierre est alerté surtout par les pétéchies* que Damien présente partout sur le corps…  
- Je suis désolé de vous le dire : votre fils ne va pas bien…  
- C’est grave, Docteur ? interroge Camille d’un ton affolé.  
- Peut-être !  
TAMTAM, quant à lui, a remarqué tout de suite que son petit Papa n’allait pas bien. Il tente encore de l’interpeller :  
- Petit Papa d’adoption, écoute-moi, c’est moi ton petit TAMTAM, tu me chauffes les oreilles et tout le corps jusqu’à la queue, recule la couette, je t’en prie !
Damien ne répond pas davantage, il se contente de serrer encore plus son Doudou contre sa joue brûlante.  
Comme d’habitude, Pierre Desbois se mouille, il prend ses responsabilités et il marque sur son billet d’accompagnement, après la formule de politesse : j’envisage le diagnostic différentiel entre méningite à méningocoque* et leucémie lymphoblastique aiguë* ?  
Il souligne les deux derniers mots avant de glisser le certificat dans une enveloppe et de la cacheter. Il la remet à Camille.  
La maman de l’enfant est catastrophée.  
- Appelez une ambulance, recommande Pierre, il faut l’hospitaliser d’urgence au Val du cerf, chez le docteur Gontrand Dufert.  
Exceptionnellement, le rouquin a perdu son sourire. Il soupire et déclare :  
- Quelle nuit ! Je vais vous suivre ! Je dois moi aussi passer par la clinique ; il y a moins d’une heure, j’ai dû hospitaliser ma fille. C’est la cruelle loi des séries !
- Pourquoi pas en pédiatrie ? demande Camille qui retrouve contact avec la réalité.   
- Ben oui, mon petit Papa aimerait mieux d’être avec des enfants !  
Le petit lapin bleu et blanc insiste mais il sait que personne ne tiendra compte de son avis car le seul qui peut l’entendre n’est pas en mesure de le faire pour l’instant.  
- Il n’y a que des adultes ici, pas la peine que je me fatigue à donner mon avis : les jeux sont faits !  
- Je préfère que Damien soit dans le service de médecine interne, déclare le médecin de famille qui a une idée derrière la tête. Si cela tombe, il se trouvera dans la même chambre que ma fille, je crois qu’ils ont pratiquement le même âge.  
- Moi je me fiche de sa fille, je maintiens que mon petit Papa d’adoption serait mieux dans le service pour les enfants !  
TAMTAM n’a pas la logique du médecin, il insiste malgré tout.  
Le médecin vient de quitter le domicile des Rocher pour rejoindre sa petite voiture grise. Camille referme la porte.
-Tu vas accompagner Damien, décide son mari, moi je te rejoindrai plus tard quand Pascaline sera partie à l’école !  
Jean est ému, le timbre de sa voix est fêlé.  
Dans la famille Rocher, on se partage les tâches ménagères : c’est souvent le Papa qui prépare le petit déjeuner et va conduire les enfants à l’école avant de gagner son lieu de travail.  
Aujourd’hui, Jean n’ira pas travailler : étant indépendant, il n’est pas astreint à la pointeuse, les jardins attendront ! Il s’occupera de Pascaline.
- Ouille ! Ouille !  
TAMTAM recommence à se plaindre mais personne ne l’entend, pas même Damien qui ne va pas mieux : au contraire, il est presque inconscient.  
Le petit garçon souffre beaucoup, il a très fort mal à la gorge ; il a de la fièvre, beaucoup de fièvre ; il a mal à la tête et mal dans le cou…  
Quand il dort, quand il est fatigué ou quand il est malade, Damien retrouve ses gestes de nourrisson : il tient son Doudou par l’oreille, entre son annulaire et son auriculaire gauches, il insère son pouce en bouche et se caresse le bout du nez de l’index. 
- Tu me fais mal à l’oreille !  
Le petit lapin bleu et blanc gémit. Le plus souvent, le petit garçon entend son Doudou se plaindre, il lâche alors son oreille et le prend entre ses deux petites mains et l’approche de son nez. Il le respire plusieurs fois et le frotte contre ses narines jusqu’à ce que TAMTAM le prie :  
- Petit Papa Damien, arrête, tu me chatouilles !  
Alors l’enfant lui sort un des sourires angéliques dont il a le secret : il comprend le message et, comme à regret, il éloigne le  petit lapin bleu et blanc de son visage et le coince sous son bras pendant quelques minutes :  
- Merci bien ! murmure le Doudou soulagé.  
Très vite, le garçonnet oublie sa bonne résolution et, par automatisme, il reprend son lapin par l’oreille gauche : la droite a déjà été recousue par Camille et il la trouve moins confortable…    
Cette nuit Damien est mal, il ne réagit pas aux prières de son Doudou. Le petit lapin doit s’en faire une raison :  
- Je vais prendre mon mal en patience, c’est ce que j’ai de mieux à faire !  
 
 
 
L'auteur : Patrick Motte

Points de vente et commandes

BIPLAN asbl - Menu principal